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À ne pas manquer
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Kim Wilde




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CHRONIQUE D'UN MONDE DE CRITIQUE CHAQUE MOIS


Foutre le bordel!

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Joeystarr

“Gare Au Jaguar” Sony BMG


Ils disaient qu’il n’y arriverait pas. Que sans le soutien de son ex-acolyte Kool Shen, le boss du scandale ne parviendrait pas à dégringoler quinze titres cohérents, lui qui n’avait sorti que le discutable single “Gaz-L” depuis la chute de NTM en 1998. Ils, c’est le petit monde du hip hop, mélange de copains et de coquins toujours prêts à hurler avec la meute. Problème pour les mauvaises langues : dès le tonitruant brûlot d’ouverture “J’Arrive”, on comprend que le flow du jaguar est plus puissant que jamais. “Y’a une guerre qui se prépare/ L’adrénaline est mon phare”, beugle Joeystarr avec une puissance de feu qui évoque les kamikazes japonais un matin de décembre 1941 à Pearl Harbor. Guitares hurlantes courtesy of Enhancer, beat à fragmentation signé DJ James (ex-DJ de NTM, rappelons-le) : ce titre est un classique, aussi surpuissant qu’inattendu avec son break calypso coincé entre les riffs fâchés des six-cordes en fusion. Est-ce tout ? Loin de là : l’adaptation du fameux hymne anti-raciste de Georges Moustaki “Gueule De Métèque” donne à Joey l’occasion d’évoquer quelques cicatrices intimes sans pour autant miauler ou faire pleurer Margot. C’est toute la force de ce disque que de slalomer entre les genres et les émotions, donnant ainsi de son auteur une image en forme de puzzle dont toutes les parties s’assemblent avec harmonie. Vous voulez de la haine ? Le jaguar gorgone en a “des camions pleins”, comme il l’affirme (preuves à l’appui) dans “Bad Boy”, tacle sauvage contre Kool Shen (qu’il ne nomme pas), MC Jean Gab’1 (“Quand tu m’emmerdes, moi j’t’encule/ Quand j’t’encule tu dis : ‘je sais, je sais’ ”) et Naja (ex-rappeur du label Boss), Booba samplé pour le refrain étant là pour arbitrer ce catalogue d’insultes hyperboliques. Impossible de ne pas évoquer “Cigarette Piégée”, ode à la freebase construite comme une remontée d’acide après une nuit de défonce, avec des lyrics à la frontière du surréalisme et une rythmique louvoyante qui lorgne sur le style crunk du Sud-Américain. “... Zy”, titre à trois voix sur le ministre au Kärcher, a sauté au dernier moment du tracklisting. Pas grave, c’est bon pour la légende et ceux qui savent le trouveront sur le net (pour le plaisir, une rime de Dadoo tirée de ce brûlot : “Depuis le Mali t’es l’anomalie de Bamako/ Avec ton speech de manager de McDo”). En revanche, Joey a insisté pour inclure au tracklisting “Gare Au Jaguarr”, adaptation fidèle du classique de Brassens, malgré le refus des ayants droit. Il n’a pourtant changé que quelques mots : ainsi pour les vers “Bah ! soupirait la centenaire/ Qu'on puisse encore me désirer/ Ce serait extraordinaire/ Et, pour tout dire, inespéré !”, le jaguarr s’est contenté de remplacer “centenaire” par... “hôtesse de l’air”. Qui a dit que les rappeurs n’avaient pas d’humour ? Air France, peut-être.
Conçu comme un album de combat destiné à enflammer les scènes, ce solo enregistré à Toulouse avec le producteur rappeur Dadoo accumule les morceaux de bravoure : “93 Déboule” et son refrain mariant le 9-3 dionysien et le 3-1 toulousain, “Carnival” et son bordel antillais avec cornes de brume et rhum Trois Rivières qui coule à flots, “Cours” et ses lyrics à bout de souffle (“Comme tout le monde, ma mort sera ordinaire/ En attendant j’cours, je chasse l’ordinaire”)... Et pour tous ceux qui ne se résolvent pas à enterrer NTM, le dernier titre “The Jam” sample Kool Shen et Joeystarr en live. Etre rock en 2006 ? Prenez gare au jaguarr.




Touché Au Cœur

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Tom Petty
“Highway Companion” American Recordings/Warner


L’ampleur du phénomène Tom Petty est difficile à mesurer de ce côté-ci de l’Atlantique. Aux Etats-Unis, l’homme est une star. Incontournable. Pour exemple, lors de ses dernières tournées estivales, les concerts de Petty ont été ouverts par les Black Crowes, en 2005, et, cette année, par les Allman Brothers... qui n’avaient pas ouvert pour qui que ce soit depuis environ 1971. Les tubes de Petty forment à eux seuls une partie substantielle de la bande-son des stations de rock dit classique. C’est là qu’interviennent ses potentiels contempteurs : ce côté consensuel, propret. De fait, s’il a été assimilé à ses débuts à la vague punk, Tom Petty n’a jamais rien eu d’un révolutionnaire. C’est dans une certaine tradition américaine que le natif de Gainesville, en Floride, s’inscrivait — celle de Dylan, du Band et des Byrds — et qu’il incarne aujourd’hui peut-être mieux que quiconque. Ou de la façon la plus archétypique. Père putatif, avec d’autres, de l’americana contemporaine. “Highway Companion” n’est jamais que son troisième disque en solo, mais l’immense majorité de ses classiques ont été commis en compagnie des Heartbreakers, backing band aussi réputé que le E Street Band de Springsteen. Agé de 56 ans, Tom Petty livre ici un disque habité par une certaine mélancolie, celle du temps qui ne cesse jamais de s’enfuir, et toujours plus rapidement. Sur certains titres, un ton un peu trop enjoué ne trompe personne : c’est dans ses instants les plus introspectifs, ou les plus délibérément désabusés, que Petty fait mouche et touche au cœur : “Square One”, “This Old Town”. Ou lorsqu’il réveille son talent pour donner vie à des personnages ballottés entre rêves trompés, innocence perdue et besoin de prendre la tangente pour conjurer tout ça : “Flirting With Time”, “Damaged By Love”, “Night Driver”. A cet égard, le titre de l’album retranscrit parfaitement son humeur : un compagnon de route, pour épauler les longs voyages nocturnes avec le macadam qui se déroule à l’infini sous la lumière des phares. Le disque n’est presque ainsi que mid-tempos qui filent les uns après les autres avec fluidité. L’instrumentation, très bien mis en relief par la production spacieuse, possède un charme soyeux : tapis de guitares acoustiques, motifs électriques ciselés par l’excellent Mike Campbell, piano électrique. Un classicisme pour le moins classieux. Le sens de la chanson (les bons accords en soutien de la bonne mélodie, tout bêtement), d’une certaine simplicité si évidente à l’écoute mais si difficile à saisir est un autre point fort de Petty, qui ne se dément pas ici. Sans atteindre toutefois les sommets de certaines œuvres passées, comme le premier album homonyme avec les Heartbreakers, “Damn The Torpedo”, “Full Moon River” ou “Wild Flowers”. Quelques chansons, sur ce disque, ronronnent peut-être en effet par trop. Et le visuel de l’album est assez discutable. Mais pour ses meilleurs moments et, comme on dit dans un autre domaine culturel, pour l’ensemble de son œuvre, l’homme méritait bien une distinction.
Bertrand Bouard

Crucial et profond

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Bob Dylan
“Modern Times” Columbia/SONY BMG


C’est avec un titre chargé de sens et un goût du mystère toujours aiguisé que Bob Dylan, masqué mais pas anonyme, pose ses cartes sur la table pour la première fois depuis 2001. “Modern Times”, pas d’article, pas de verbe non plus qui annoncerait qu’ils seraient A-Changin’, juste un constat, presque un aveu. Ces temps modernes dont Bob Dylan a l’air de ne pas vouloir être l’esclave et auxquels il lance, défiant, sa vision des choses. Un disque qui se refuse à toute attache sauf celle, éternelle, du beau et du vrai. Dès 1997, Dylan avait infusé l’album “Time Out Of Mind” d’une atmosphère crépusculaire dégagée du temps et architecturée par le producteur Daniel Lanois. Le sentiment lugubre s’est trouvé souligné lorsqu’une alerte médicale a failli emmener Dylan “rejoindre Elvis”, selon ses propres termes. Il était un peu facile toutefois de tenter de lire dans son écriture une plus grande préoccupation avec l’au-delà qu’à n’importe quelle autre époque de sa carrière. Mais visiblement, une brèche avait été ouverte, confirmée par “Love & Theft”, sorti en 2001, au son enlevé du western swing, du jump blues et de valses honkytonk. Cinq ans de plus et voici donc “Modern Times”. Un disque qui poursuit dans la même voie, lui aussi autoproduit sous le pseudonyme de Jack Frost, mais qui affine et précise le propos avec un soin et une finesse surprenantes. Guitares acoustiques, batteries aux balais, contrebasses et cordes discrètes, le son de l’album détaille, orne et met en couleurs l’idéal sonique que “Love & Theft”, trop chargé en blues rustauds, ne faisait qu’esquisser. Enregistré rapidement au début de l’année par son groupe de scène, mené par l’indémontable bassiste Tony Garnier et complété par George Recile à la batterie, Stu Kimball et Denny Freeman aux guitares et par le multi-instrumentiste Donnie Herron, le disque dégage une impression générale d’un plaisir manifeste. Dans les blues jubilatoires tel “Rolling And Tumbling”, relecture d’un traditionnel quasi homonyme durant lequel Dylan renonce à la gent féminine toute entière (“I swear I’m not gonna touch another woman for years”) tout comme dans le tendre swing de “Spirit On The Water”. Une tendresse musicale qui ne l’empêche pas de décocher dans cette dernière des flèches verbales au poison toujours aussi virulent : “You think I’m over the hill/ You think I’m past my prime/ Let me see what you got/ We’re gonna have a good time”. Le plaisir, on le trouve aussi dans l’étonnante souplesse de sa voix. Car le barde de Duluth n’a pas chanté avec autant d’entrain depuis “Nashville Skyline”, auquel “Modern Times” fait souvent penser. Le splendide “Workingman’s Blues n°2”, au titre évoquant à la fois Merle Haggard et Grateful Dead, “Beyond The Horizon”, “Nettie Moore” et “Ain’t Talkin’ ” sont autant de triomphes vocaux d’une telle beauté qu’ils rendent attendrissants par contraste les blues grincheux tels que “The Levee’s Gonna Break” et “Someday Baby”. La cohérence du disque est remarquable et son équilibre est délicat, composé d’éléments qui se complètent et se répondent. Comme si Dylan avait cherché à reproduire ces sons qui sortaient du récepteur radio à lampes du salon de se parents à Hibbing (une Zenith, selon les biographes) : R&B urbain, country baladine, swing cow-boy, sérénades croonées, une touche de doo-wop et même un brin de Broadway avec le bijou “Beyond The Horizon” que n’auraient pas renié Rodgers & Hammerstein. Tout ce qui paraissait ringard et/ou nuisible aux yeux des folkeux et des psychédéliques des années 60. Or cette musique qui tourne en 78 tours, Dylan doit forcément lui conférer un idéal de pureté musicale à laquelle il aspire désormais. “Mes racines sont dans les années 30, pas les années 50”, a-t-il un jour déclaré et il le prouve encore. Les nombreuses références et évocations d’autres chansons sont la preuve de la forme vivante du travail de Dylan, qui recompose et réécrit des rengaines qui vivent et se promènent dans son paysage musical interne, comme ce “When The Deal Goes Down” poignant, dont le titre évoque “Don’t Let Your Deal Go Down” de Charlie Poole, équivalent blanc de Robert Johnson (et qui sortait lui aussi ses disques chez Columbia). Quant au bouleversant “Nettie Moore”, c’est le titre qui s’approche le plus du vocabulaire folk traditionnel, une ballade traversée par le fantôme de Stephen Foster dans laquelle le narrateur tente de “se réconcilier avec son destin” et menace “before you call me dirty names/ you better think twice” avant de conclure sur ce constat apocalyptique : “The winter’s gone/ The river’s on the rise/ There’s nowhere left to turn/ The world has gone black before my eyes”. Un classique de Dylan, qui aurait cru qu’on y aurait encore eu droit ? Sa méthode d’écriture laisse découler un flot d’associations d’idées (“I wonder where in the world Alicia Keys can be” dans “Thunder In The Mountain”) et d’observations détaillées et ravive le souvenir de ses méthodes datant de “Blood On The Tracks”, une absence de temporalité que Dylan lui-même associait au travail pictural plutôt que lyrique ou narratif. Il se place en observateur (“Thunder In The Mountain”), en vagabond, en amant trahi (“Someday Baby”) ou transi (“When The Deal Goes Down”, “Working Man’s Blues n° 2”), et en accusateur indigné dans le stupéfiant “Ain’t Talkin’ ”. Et là les amis, on tient un chef-d’œuvre modèle “Desolation Row”, une mélodie circulaire et entêtante et un flot d’images et de mots gravés par un virtuose au sommet de son art. Carrément. Alors voilà, album du mois ou de l’année, allez savoir. Ça fait quarante ans que Bob Dylan fait la couverture de Rock&Folk et que tout le monde, partout, analyse et décortique chaque miette de son art et pourtant, il réussit encore à triompher, à se surpasser et à éblouir. A s’extraire avec une volonté remarquable de tous les pièges dans lesquels sa situation pourrait le précipiter et de continuer à être un artiste vital, crucial et profond. Et surtout à faire des disques d’une beauté qui ne se compare désormais plus à ses contemporains ni même à ses aînés mais à lui seul. Ce sont des choses qui, au final, ne s’expliquent pas. Elles se constatent, c’est tout.
Nikola Acin